Mort d’Étienne Nodet, grand connaisseur de l’Antiquité juive

Le frère dominicain Étienne Nodet, professeur à l’École biblique et archéologique française (Ebaf) à Jérusalem, est décédé en Terre sainte dimanche 4 février, à l’âge de 79 ans. 

Christel Juquois, La Croix du 7/2/24

Il est décédé comme il a vécu, au cœur de la nuit, le 4 février, tombé en plein travail sur la nouvelle traduction de la Bible qu’il préparait à l’École biblique et archéologique française (Ebaf). Le frère dominicain Étienne Nodet, né à Bourg-en-Bresse en 1944, était entré dans l’ordre des prêcheurs en 1967, dans la province de Lyon, après des études à l’École polytechnique.

Après avoir passé deux maîtrises de théologie et de philosophie, il était parti en 1974 étudier le Talmud à l’Université hébraïque de Jérusalem où il vécut pendant trois ans à la Maison Saint-Isaïe, fondée par les dominicains de France à Jérusalem-Ouest, en proximité avec le nouvel État d’Israël en pleine construction. Rejoignant l’Ebaf en 1977, il enseigna et écrivit pratiquement jusqu’à sa mort, laissant « une bibliographie impressionnante », selon le frère Olivier Catel, de l’École biblique, dont le domaine de recherche est proche de celui d’Étienne Nodet.

« Un esprit original, pour qui rien ne coulait jamais de source »

« Il s’était passionné pour l’histoire juive, de la fin du VIe siècle avant notre ère, marquée par le retour des juifs de l’exil à Babylone, à la fin du Ier siècle, se souvient le frère Olivier Catel. C’était un fin connaisseur de la littérature rabbinique et de la culture juive, mais aussi du monde hellénistique. » Parlant cinq langues modernes et quatre langues anciennes, il a marqué la recherche par ses travaux sur l’historien juif et citoyen romain Flavius Josèphe : « Il a été un traducteur hors pair des Antiquités juives. » Mais il a aussi beaucoup étudié les Samaritains, considérés par les juifs comme schismatiques et même comme païens. Les travaux du frère Étienne l’avaient amené à penser qu’ils avaient en réalité conservé le dépôt véritable de la foi juive pendant la période de l’exil. Dans la dernière partie de sa vie, il s’est passionné pour les esséniens.

« J’ai eu la grande chance de l’avoir comme professeur sur la Mishna, estime frère Olivier Catel, actuellement à Oxford pour un an d’études talmudiques. Même s’il n’était pas toujours facile. C’était un esprit original, parfois provocateur, pour qui rien ne coulait jamais de source. Il n’aimait pas la langue de bois. Mais il était très apprécié de tous ceux qui l’avaient eu comme confesseur ou accompagnateur spirituel », rappelle frère Olivier avec émotion. Le frère Étienne Nodet a été enterré à Jérusalem.

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