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Le véritable Jésus reste le Jésus que nous offrent les Evangiles

Joseph Ratzinger

Extrait de l'interview qu'il a accordée à Guido Horst pour« Die Tagespost », à l'automne 2003. Troisième tome du XIIIe volume de l'Opera Omnia. Publié par Sandro Magister avec l'autorisation de la Librairie éditrice vaticane. L'article complet fait une vingtaine de pages.

Q. – Il est toujours de « bon ton », entre catholiques soucieux de la tradition, de parler d’une crise de la foi dans l’Église. Mais n’en a-t-il pas toujours été ainsi ?

R. – Tout d’abord, je voudrais vous donner raison. La foi du croyant individuel a toujours connu ses difficultés et ses problèmes, ses limites et sa mesure. Nous ne pouvons pas en juger. Mais dans la situation spirituelle de base, pour ainsi dire, quelque chose de différent s’est produit. Jusqu’aux Lumières, et même ensuite, il n’y avait aucun doute sur le fait que le monde était empreint de Dieu, il était en quelque sorte évident que derrière ce monde il y avait une intelligence supérieure, que le monde, avec tout ce qu’il contient – la création avec sa richesse, sa raison et sa beauté – était le reflet d’un Esprit créateur. Et il y avait aussi, par-delà toutes les divisions, l’évidence fondamentale que, dans la Bible, c’est Dieu lui-même qui nous parle, qu’il nous a révélé son visage, que Dieu vient à notre rencontre dans le Christ. Alors qu’à l’époque, il y avait, disons, un présupposé collectif d’adhérer d’une manière ou d’une autre à la foi – toujours avec toutes les limites et faiblesses humaines – et qu’il fallait réellement un acte de rébellion intentionnelle pour s’y opposer; après les Lumières, tout a changé: aujourd’hui, l’image du monde est exactement inversée.

Tout est, semble-t-il, expliqué sur un plan matériel ; l’hypothèse de Dieu, comme le disait déjà Laplace, n’est plus nécessaire, tout s’explique à travers des facteurs matériels. L’évolution est devenue, pour ainsi dire, la nouvelle divinité. Il n’y a aucun passage qui semble nécessiter un Créateur. Au contraire, son introduction semble contredire la certitude scientifique, et c’est donc quelque chose d’indéfendable. De la même manière, la Bible nous a été arrachée des mains, et on nous a expliqué qu’il fallait la considérer comme un produit dont l’origine pouvait être expliquée historiquement, reflétant des situations historiques et qu’elle ne nous disait pas du tout ce que nous pensions pouvoir en tirer, qu’au contraire il s’agissait de tout autre chose.

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